Lorsque l’on parle d’anxiété ou d’angoisse, nous pensons que cela concerne principalement les adultes. Si la vision du monde de l’enfance pleine de spontanéité, de candeur et d’innocence est encore bien présente, elle n’est malheureusement plus aussi vraie. Les grands changements sociétaux de ces dernières décennies mettent beaucoup de pression sur les épaules des adultes et, désormais, des enfants (élitisme, standard de réussite, pressions et exigences scolaires…) Depuis quelques années, je reçois de plus en plus d’enfants angoissés ou anxieux et ils sont de plus en plus jeunes à franchir le seuil de ma porte.
L’angoisse et l’anxiété sont deux émotions très fortes mais aussi très malignes qui sont capables de ‘’se déguiser’’ pour s’exprimer de diverses façons et, du coup, qui vont être difficilement identifiables.
Si les signes ‘’classiques’’ de l’angoisse sont : peine à respirer, accélération du rythme cardiaque, sentiment d’oppression au niveau de la poitrine, sueurs… Chez certains enfants l’angoisse se traduit par des grosses colères, une irritabilité exacerbée, beaucoup de pleurs, des débordements émotionnels, une régression, un état de stress constant…
L’angoisse a un impact sur le physique, le mental, l’émotionnel, les relations sociales, etc. Une spirale infernale se met en place et on angoisse à l’idée d’angoisser.
Quelles sont les différences entre peur, anxiété et angoisse ?
La peur est une émotion qui indique un danger réel ou fictif. Elle est fréquente chez les enfants et peut être difficile à comprendre pour l’adulte. La peur, d’un enfant ou d’un adulte, est à respecter, écouter et accueillir. Elle est indispensable pour notre sécurité, elle nous met en garde, nous dit de faire attention ; mais elle ne doit pas nous empêcher d’avancer.
L’anxiété est une émotion plus diffuse qui crée un mal-être général qui peut se traduire par le sentiment d’être à fleur-de-peau, tout le temps sur le qui-vive, d’avoir une respiration courte… L’anxiété peut devenir chronique.
L’angoisse est ponctuelle et répétée et survient souvent sous forme de crise. Elle est le résultat d’une anxiété démultipliée et d’un état de stress permanent. Très vite, une spirale infernale se met en place dans laquelle la personne angoisse à l’idée d’angoisser. Lors de crises d’angoisse, il y a de fortes réactions physiques et chimiques.
Pour résumé, la peur est liée à une situation précise (peur d’un examen, de prendre l’avion, des araignées, du futur…) souvent en lien avec le sentiment de ne pas pouvoir maitriser la situation ou de ne pas être à la hauteur. L’anxiété est quelque chose de plus diffus mais qui génère un malaise général chez la personne (adulte ou enfant). Il n’y a pas forcément de déclencheur précis ou identifié. Souvent, on va parler de stress. L’angoisse est extrêmement perturbante car elle survient de manière soudaine et forte avec des effets physiques violents. Elle prend très vite beaucoup de place dans la vie de la personne.
Quelles sont les conséquences de l’angoisse/anxiété sur le physique ?
Beaucoup d’adultes et d’enfants souffrent d’angoisse ou d’anxiété et cela a un impact sur tout leur être.
Le corps garde en mémoire tout ce qui n’est pas compris, digéré, accepté… Il va manifester de plus en plus fortement son mal-être et ses tensions pour nous faire prendre conscience que quelque chose « ne tourne pas rond » !
Divers troubles physiques peuvent apparaître avec l’angoisse/l’anxiété :
- douleurs (migraines, dos…) ;
- troubles alimentaires (perte/augmentation de l’appétit, digestion difficile…) ;
- troubles du sommeil (insomnies, cauchemars, réveils nocturnes…) ;
- troubles respiratoires (accélération de la respiration, sensations d’oppression dans la poitrine…) ;
- tensions physiques (nuque raide, grincement de dents…) ;
- nausées, vomissements ;
- tics nerveux ;
- automutilation ;
- tremblements ;
- pâleur ;
- vertiges ;
- fatigue ;
- etc.
Pour soulager le corps, il va être nécessaire d’identifier le ou les déclencheur-s de ces manifestations. Quand sont-ils apparus ? A quelle fréquence se produisent-ils ? etc. Voici quelques exemples de source d’anxiété :
- jongler entre travail et famille, pressions professionnelles et/ou familiales…
- devoir être multitâche et tout faire vite ;
- l’école ;
- les devoirs et/ou les difficultés scolaires ;
- le regard de l’autre ;
- le changement de travail ;
- le deuil ;
- les difficultés financières ;
- etc.
Les hormones et les mécanismes de défense
Dans les situations anxiogènes, l’organisme sécrète principalement deux hormones : l’adrénaline et le cortisol.
L’adrénaline est l’hormone ‘’du combat’’ ! L’organisme va sécréter cette hormone pour donner un surplus d’énergie qui va permettre à la personne de se battre ou de partir à toute allure. Elle donne la pulsion, la réaction.
Le cortisol met en hypervigilance. Les cinq sens sont en éveil, la personne est à l’affût de tout ce qu’il se passe autour d’elle (elle perçoit les moindres bruits, le regard se fait plus perçant, etc.).
Dans une situation anxiogène, l’enfant (ou l’adulte) va y faire face avec ses mécanismes de défense qui peuvent être : la fuite, l’attaque ou se figer.
L’enfant qui a comme mécanisme de défense la fuite peut par exemple :
- mettre la faute sur les autres,
- être dans la lune,
- partir en courant,
- se cacher sous la table,
- …
Si le mécanisme de défense est l’attaque, on va retrouver des comportements comme :
- mordre, taper
- crier,
- langage agressif
- déchirer son dessin,
- …
Lorsque le mécanisme est de se figer, les comportements peuvent être :
- repli sur soi,
- passivité,
- ne répond pas quand on le questionne,
- reste complétement immobile, ne bouge plus,
- …
Chez certains enfants, crier et taper ne sont pas forcément synonymes de colère mais peut-être d’un état anxieux. Tout comme l’enfant qui est dans la passivité n’est pas un enfant qui se fiche de ce qu’il se passe. L’enfant gère au mieux une situation à forte charge d’anxiété ou d’angoisse et donc à forte charge émotive.
Angoisse, anxiété, peur le grand méli-mélo émotionnel !
Les états anxieux perturbent le bon fonctionnement physique (douleurs, tensions, insomnies…) et sécrètent les hormones du stress (cortisol, adrénaline). Malheureusement, ils ne s’arrêtent pas uniquement au corps. L’anxiété et l’angoisse mettent aussi le bazar au niveau émotionnel. Les émotions ne sont pas toujours facilement identifiables et l’angoisse ne se manifeste pas uniquement sous forme de peur, de difficulté à respirer, etc. Suivant le mécanisme de défense prioritaire, les réactions émotionnelles vont être très différentes !
Opposition, colère, cris, pleurs, fuite, rire (nerveux)… peuvent révéler de l’anxiété ou de l’angoisse (mais bien sûr, ce n’est pas systématiquement le cas). Là derrière se cache : la peur de ne pas être à la hauteur/de perdre le contrôle… ; la perte d’estime et de confiance en soi ; de l’irritabilité ; de la culpabilité ; de la morosité ; de la jalousie ; de l’insécurité ; de la lassitude ; et bien d’autres encore…
Donc, lorsqu’un enfant entre dans de grosses colères il peut être ‘’simplement’’ en colère. Mais comme je le constate régulièrement dans ma pratique, il peut aussi être anxieux ou angoissé. L’angoisse et l’anxiété ont l’art sournois de se déguiser pour prendre différents visages ! C’est pourquoi, il est important de chercher ce qui se cache derrière une émotion, un comportement. Dans chaque comportement, l’enfant a une intention et il ne sait pas l’exprimer autrement. Que veut-il dire en adoptant ce comportement ? Est-ce que ça colère peut cacher autre chose? etc.
Quelles sont les difficultés sociales causées par l’angoisse, l’anxiété, la peur ?
L’enfant (ou l’adulte) peut :
- avoir peur du regard de l’autre,
- avoir de la difficulté et/ou refuser d’entrer en relation,
- avoir de la difficulté à se faire une place dans un groupe,
- avoir de la difficulté à se concentrer,
- se replier sur lui-même, s’isoler,
- etc.
Souvent, il/elle a peur d’avoir peur, angoisse à l’idée d’angoisser. Cela crée le sentiment de perdre le contrôle à chaque instant ce qui empêche de vivre une vie ‘’normale’’, de sortir voir du monde en toute tranquillité et de profiter du moment présent. L’enfant peut refuser d’aller à un anniversaire ou se priver de quelque chose dont il a vraiment envie par anxiété. C’est plus fort que lui ; le forcer, le menacer ou le gronder ne servira à rien si ce n’est à augmenter son anxiété. Pour l’aider, il faut découvrir ce qui nourrit son anxiété pour pouvoir ensuite mettre en place des stratégies, des outils pour l’aider à la surmonter.
Que faire ?
Voici quelques outils qui peuvent aider à contrer l’angoisse ou l’anxiété autant pour les enfants que les mamans. Car ne l’oubliez pas, l’angoisse est contagieuse peut-être même plus que la gastro 😉
- Identifier les signes avant-coureurs. C’est souvent par des changements physiques que l’on peut repérer (changement de couleur du visage, changement du rythme de la respiration, tensions musculaires…)
- Créer le dialogue sans trop questionner.
- La respiration abdominale, peut paraître simpliste mais c’est un outil puissant, est un bon moyen pour aider l’enfant à contrer l’angoisse. Demander à l’enfant de se coucher sur le dos puis placer sur son ventre un cahier ou un livre qui ne soit pas trop lourd. Faites-le inspirer profondément par le nez puis expirer par la bouche, il doit voir monter et descendre le cahier placé sur lui. Cet exercice a une double action, il aide à retrouver une respiration calme et il permet au mental de sortir des pensées angoissantes.
- Travailler sur vos propres angoisses ! car l’enfant est une éponge émotionnelle qui ressent vos émotions.
- Les huiles essentielles (lavande, ylang ylang, basilic, orange amère).
- Le thé vert et le chocolat noir ont une action sur le cortisol.
- Se faire masser.
- Faire du sport.
- Faire des pauses de quelques minutes plusieurs fois par jour même si tout s’agite autour de vous.
- Etc.
Il n’y a pas une seule manière de vaincre l’angoisse et l’anxiété. Il y autant de façon qu’il y a de personnes angoissées ou anxieuses !
Si vous n’arrivez pas à vous en défaire, ne restez pas seul-e avec ce problème parlez-en et s’il le faut n’hésitez pas à consulter un spécialiste. Ces émotions anxiogènes perturbent grandement la vie de la personne qui en souffre et de son entourage. Et n’oubliez pas que les émotions sont plus contagieuses que la gastro 😉!