Dans le monde de l’éducation, certains concepts semblent émerger comme des nouveautés, alors qu’ils ne font parfois que remettre en lumière des principes déjà bien établis. L’association entre bienveillance et fermeté est aujourd’hui au cœur des discours éducatifs, comme une clé essentielle pour accompagner l’enfant tout en posant des limites claires. Mais ce que nous appelons désormais ainsi ne serait-il pas simplement une reformulation moderne de l’axe affectif et normatif dont parlait Maurice Nanchen dans son livre « Ce qui fait grandir l’enfant ? affectif et normatif : les deux axes de l’éducation », Ed. Saint-Augustin, 2002
L’axe normatif et l’axe affectif : deux dimensions essentielles
Maurice Nanchen distingue dans l’éducation deux piliers fondamentaux :
👉 L’axe normatif, qui représente le cadre, les règles et les limites. C’est lui qui structure, qui permet à l’enfant de se repérer et de comprendre ce qui est attendu de lui. Cet axe est essentiel pour la construction de l’individu, car un enfant sans repères clairs peut se sentir perdu et insécurisé.
👉 L’axe affectif, qui incarne le lien, la reconnaissance et la sécurité émotionnelle. Un enfant a besoin de se sentir vu, entendu et compris. Cet axe repose sur la qualité de la relation avec l’adulte, sur l’écoute et sur le soutien apporté dans les différentes étapes de son développement.
Ces deux axes ne doivent jamais être dissociés : un excès de normatif sans affectif mène à une éducation rigide et froide, tandis qu’un excès d’affectif sans normatif conduit à un laxisme où l’enfant ne trouve plus de repères stables.
De l’axe normatif-affectif à la bienveillance et à la fermeté (à lire aussi « Frustrer un enfant est un acte de bienveillance » https://valerielassueur.ch/frustrer-un-enfant-est-un-acte-de-bienveillance/ )
Aujourd’hui, ces deux axes sont largement repris sous les termes de bienveillance et de fermeté. La bienveillance correspond à l’axe affectif : elle implique une posture d’écoute, d’empathie et de compréhension des besoins de l’enfant. La fermeté, elle, fait écho à l’axe normatif : elle garantit un cadre sécurisant et structurant.
Mais cette reformulation soulève une question : sommes-nous face à une évolution pédagogique réelle ou simplement à un changement de vocabulaire ?
Le succès actuel de la bienveillance en éducation s’inscrit dans un contexte où les neurosciences ont mis en évidence l’importance du lien d’attachement, du respect des émotions et de la co-régulation des enfants. Mais dans cette quête d’une éducation plus respectueuse, le cadre n’a pas disparu. Il est simplement repensé pour être mieux compris et mieux accepté par l’enfant.
Un effet de mode ou une redécouverte essentielle ?
Certaines critiques évoquent un effet marketing, où de nouveaux concepts émergents pour habiller de modernité des principes éducatifs déjà connus. On pourrait en effet considérer que la bienveillance et la fermeté ne sont qu’une reformulation contemporaine de ce que les éducateurs·trices appliquent depuis longtemps sous d’autres termes.
Mais la réalité est plus nuancée. Si le fond reste le même, la manière de poser ce cadre évolue. La fermeté n’est plus synonyme d’autoritarisme, mais d’un cadre clair et expliqué. La bienveillance ne signifie pas tout accepter, mais comprendre les besoins sous-jacents à certains comportements. Cette approche permet d’abandonner progressivement les méthodes basées sur la peur ou la contrainte, pour les remplacer par des stratégies plus respectueuses du développement de l’enfant.
Comment trouver cet équilibre au quotidien ?
Dans la pratique, cet équilibre est un ajustement permanent. Pour accompagner les enfants tout en respectant leur besoin de sécurité et d’apprentissage des règles, il est essentiel de :
✅ Poser un cadre clair et cohérent en posant des règles et en maintenant une constance dans leur application.
✅ Écouter et reconnaître les émotions de l’enfant, sans pour autant céder à toutes ses demandes. On répond aux besoins et non aux envies.
✅ Privilégier les conséquences logiques aux punitions arbitraires pour que l’enfant comprenne le sens des règles plutôt que d’obéir par peur.
✅ Faire preuve d’adaptabilité car chaque enfant a un tempérament et une sensibilité qui influencent la manière dont il intègre les repères.
✅ Se questionner régulièrement sur sa posture d’adulte pour éviter de basculer involontairement dans le laxisme ou dans un cadre trop rigide.
Finalement, que l’on parle aujourd’hui de bienveillance et de fermeté ou hier de l’axe affectif et normatif, l’essentiel reste le même : l’enfant a besoin à la fois de sécurité affective et de repères clairs pour se développer sereinement.
Ce qui évolue, c’est avant tout la manière dont nous posons ce cadre. Il ne s’agit plus d’exercer une autorité rigide mais d’accompagner l’enfant en tenant compte de ses besoins en ajustant notre posture. Trouver cet équilibre est un défi permanent qui exige à la fois réflexion, observation et ajustement de notre posture d’adulte.
💡 Et vous, comment vivez-vous cet équilibre dans votre quotidien éducatif ? Plutôt facile à régler ou source de dilemmes ?
C’est cette réflexion que nous approfondirons lors de la journée thématique « Autorité & Bienveillance : 2 ingrédients essentiels en éducation ». À travers des échanges, des mises en situation et des outils concrets, nous explorons comment ajuster notre posture éducative pour trouver le juste équilibre entre fermeté et bienveillance, entre cadre et relation .
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