À certaines périodes, les « c’est pas juste !» fusent à tout va, pour tout, pour rien. Quelques fois, ils sont justifiés mais pas systématiquement. L’enfant peut vivre le sentiment d’injustice de manière très violente et douloureuse.
Chaque parent et/ou professionnel-le veut être équitable avec les enfants, ‘’lui donner la même chose’’. Mais, malgré tous les efforts mis en place, certains enfants ressentent tout de même un très fort sentiment d’injustice.
Qu’est-ce que l’injustice, l’équité et l’égalité ?
Le sentiment d’injustice est le fait de ressentir une inégalité, un tort ou un abus, de trouver que quelque chose est arbitraire, etc. Nous parlons d’équité lorsque nous nous servons de différents moyens pour obtenir un résultat identique. Les moyens sont choisis en fonction des besoins de la personne, de la situation… L’égalité, elle, utilise des moyens identiques pour tout le monde sans tenir compte des besoins spécifiques de la personne. C’est pourquoi, de cette différence peut naitre chez les enfants le sentiment d’injustice. Parce que les outils ne sont pas les mêmes. En même temps, le fait d’utiliser les mêmes outils peut également faire naitre ce sentiment car il respecte moins les besoins, les goûts de chaque individu.
Est-ce possible de toujours ‘’donner la même chose’’ à chaque enfant ?
Tout ne peut être quantifiable et vérifiable. Lorsqu’il s’agit d’actions concrètes (faire avec/pour), telles que partager la même quantité de quelque chose (objets, jouets, bonbons…) ou octroyer le même temps pour une activité avant le coucher, la tâche est plutôt facile. Dès que la situation devient plus abstraite (liée aux sentiments, à la relation, au fait d’être/exister), il est beaucoup plus difficile de démontrer l’égalité.
Pour certains enfants, le simple fait que l’on ne réponde pas à ses envies, ses demandes peut faire apparaître le sentiment d’injustice. Il doit apprendre que ce n’est pas une injustice lorsque les choses ne se passent pas comme il veut. Bref rappel de quelques points importants sur le début de la socialisation. A sa naissance, l’enfant ne fait qu’un avec sa mère, il est sa maman et sa maman est lui. Tout gravite autour de lui pour répondre à ses besoins vitaux. En grandissant, il va apprendre que d’autres existent et qu’il doit partager (l’attention de son entourage, les jouets…) et donc se socialiser. Les 6 premiers mois, c’est principalement la découverte du monde par son corps (les diverses sensations physiques agréables et désagréables, mettre à la bouche…) De 6 à 15 mois, l’enfant utilise ses nouvelles compétences motrices pour explorer le monde par le mouvement (ramper, marcher…). De 16 à 36 mois, l’enfant commence à jouer avec les autres même si les interactions peuvent être ‘’musclées’’ griffures, morsures… C’est la période où il est attiré vers les autres mais il n’a pas encore les moyens de communication adéquats.
Est-ce nécessaire et éducatif de ‘’donner la même chose’’ ?
Un petit pois de plus dans l’assiette et c’est la crise ! « C’est pas juste ! Elle a toujours plus que moi… » Les enfants se comparent beaucoup entre eux. Leur sens de la justice se construit dès leur plus jeune âge. L’apprentissage de l’individualité, au sens qu’ils sont des êtres uniques, que leurs besoins sont spécifiques en fonction de leur âge, de leur développement…, implique de ne pas ‘’donner la même chose’’ à chacun.
Jusqu’à 6 – 7 ans, l’enfant se construit surtout par les affects ; il est alors plus difficile de lui faire comprendre la notion de justice et d’injustice. À partir de 8 – 10 ans, on peut commencer à l’aider à prendre du recul et observer concrètement la situation, à lui faire prendre conscience de ses besoins, à lui apprendre à examiner le plus objectivement possible la situation qu’il juge injuste.
Un autre sentiment d’injustice
Certains enfants sont aussi très sensibles aux injustices que peuvent subir leurs copains. Par exemple, lorsqu’un enfant se fait gronder à la place d’un autre ou lors d’une sanction collective, le sentiment d’injustice peut surgir de manière très forte. Cette injustice apporte son lot d’incompréhension, de frustration, de peur, de perte de contrôle, etc. Ces situations peuvent faire naitre un profond sentiment de malaise car l’enfant ne comprend pas pourquoi cela se passe ainsi. Ce malaise peut se traduire par une montée d’angoisse ou d’une grosse colère ou …
Comment aider l’enfant à sortir de son sentiment d’injustice ?
- L’aider à différencier ses envies de ses besoins, par exemple, « J’ai faim, j’aimerai du chocolat » -> la faim est un besoin mais le chocolat est une envie. Un besoin est vital et doit être satisfait. Alors qu’une envie est éphémère et elle ne nuit aucunement à la personne si elle n’est pas satisfaite.
- Apprendre à prendre du recul.
- Lui expliquer le pourquoi des différences entre les frères et sœurs. En lui montrant le plus clairement possible ce qu’il ‘’gagne’’ lui et en quoi l’activité de son frère ou sa sœur ne lui apporterait pas autant que celle qu’il fait.
- Le questionner suffisamment pour l’aider à voir la situation le plus objectivement possible. Par exemple : « qu’est-ce qui serait juste pour toi ? », « comment verrais-tu la situation pour qu’elle soit juste pour toi ? et ainsi, serait-elle juste pour X ?», « quand est-ce que tu ressens le plus d’injustice ? où ? avec qui ? pourquoi ? … ». Ce n’est qu’un tout petit exemple de questions ?
En conclusion, chez certains enfants, le sentiment d’injustice est très fort et crée de vives réactions émotionnelles telles que colères ou angoisses par exemple. C’est un apprentissage qui va prendre du temps et qui va demander de la patience et de la cohérence de la part des adultes. D’ailleurs, cet apprentissage se poursuit souvent sur le long terme.